Dermatose bovine : le point sur la mobilisation agricole en direct
Des agriculteurs en colère contre l'abattage de troupeaux affectés par la dermatose bovine ont bloqué vendredi l'autoroute Toulouse-Bayonne, alors que le gouvernement a réaffirmé sa politique et étendu vendredi les zones de vaccination obligatoire dans le Sud-Ouest face « à la dégradation soudaine de la situation sanitaire ». [Article initialement paru le 12 décembre, mis a jour au fil des journées du 13 et 14 décembre]
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En réaction aux nombreuses manifestations, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard a annoncé assister ce lundi « au début de la vaccination » de troupeaux bovins dans le Sud-Ouest, où des éleveurs contestent vigoureusement sa gestion de la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) en bloquant toujours plusieurs routes dimanche matin.
La ministre bénéficie du soutien de Maud Bregeon, porte parole du gouvernement, quant à la stratégie d'abattage et de vaccination. « Ce n'est pas une décision politique (...) c'est une décision sanitaire qui a été concertée (...) depuis juillet dernier avec le Parlement sanitaire qui comprend des vétérinaires, des éleveurs, les chambres d'agriculture, les organisations syndicales, les services de l'Etat, l'Anses » (Agence nationale de sécurité sanitaire), a souligne Mme Bregeon à la presse.
Elle a rappelé que la FNSEA, le premier syndicat agricole, soutenait la stratégie du gouvernement.
D'autres dossiers brûlants comme la baisse annoncée du budget de la Politique agricole commune (PAC) européenne et l'accord de libre-échange prévu entre l'UE et des pays du Mercosur alimentent aussi la colère des agriculteurs.
La France a demandé dimanche à l'UE de reporter des « échéances » prévues cette semaine pour la signature de cet accord commercial, estimant que les conditions ne sont « pas réunies pour un quelconque vote » des Etats européens, a indiqué Matignon.
27 actions recensées le 14 décembre
Au niveau national, les autorités ont recensé « un peu plus d'une quinzaine d'actions sur 13 départements réunissant entre 900 et 1.000 personnes » le 13 décembre, ponctués par endroits de « tensions », selon l'entourage du ministre de Intérieur Laurent Nuñez.
Le 14 décembre, 27 actions étaient recensées, rassemblant un peu plus de 1.000 agriculteurs, selon le ministère de l'Intérieur.
Jérôme Bayle et ses hommes bloquent l'A64
Le 12 décembre, des agriculteurs au volant de 80 tracteurs ont débuté le blocage de l'A64 à la hauteur de Carbonne (Haute-Garonne), y installant un campement. Jérôme Bayle, initiateur des manifestations agricoles de 2024, est à la tête du blocage.
Des actions dans tout le sud-ouest
Au-delà de l'A64, les manifestations s'entraînent dans tout le sud-ouest. En Ariège, non loin de la ferme de Tarascon-sur-Ariège où 200 vaches ont été abattues cette semaine après des heurts entre agriculteurs et forces de l'ordre, près de 150 éleveurs et exploitants agricoles occupaient malgré le froid un rond-point et bloquaient la route vers l'Andorre, a constaté un journaliste de l'AFP dimanche 14 décembre.
Le même jour en Haute-Garonne, entre 100 et 150 agriculteurs se sont réunis au pied d'un calvaire à Benque, devant une ferme où un bovin est suspecté d'être infecté par la DNC, dans l'attente des résultats des tests, selon un autre journaliste de l'AFP.
« On est parti pour passer les fêtes ici », a assuré à l'AFP Cédric Baron, agriculteur-éleveur de bovins à Montoussin (Haute-Garonne), mobilisé à Carbonne, point de départ d'un précédent mouvement de protestation agricole en janvier 2024.
Action forte des agriculteurs aujourd'hui à Carbonne pour dénoncer la politique d'abattage total systématique menée par le gouvernement !
— Manon Meunier (@ManonMeunier_UP) December 12, 2025
Avec mon collègue @ChristopheBex, nous étions présents en soutien à la mobilisation. La violence inouïe dont use le gouvernement contre des… pic.twitter.com/Ic1ofRzNfa
Manifestation devant l'ancienne permanence parlementaire d'Annie Genevard
Samedi 13 décembre, sur fond de pétards et de fumigènes, les manifestant de la CR ont installé un barbecue devant la permanence du député de la circonscription Eric Liégeon qui a remplacé Annie Genevard.
Ils ont accroché un veau mort à un arbre et posé en dessous un panneau proclamant « nos animaux, notre vie ». La Coordination rurale (CR), qui a appelé à cette mobilisation, dénonce des « décisions sanitaires absurdes et destructrices ».
« On demande au gouvernement de nous écouter, (...) on demande à ce qu'on stoppe les abattages de tous les troupeaux, vraiment qu'on fasse du cas par cas et qu'on apprenne à vivre avec la maladie », a déclaré Céline Lhomme, exploitante à Pouilley-Français, dans le Doubs. La semaine dernière, son troupeau de 83 vaches a été abattu en raison d'un cas de dermatose.
Des actions dans la ville de Millau
Dimanche 14 décembre, une cinquantaine d'agriculteurs, sous les applaudissements de manifestants et badauds, ont recouvert dimanche la sous-préfecture de Millau (Aveyron) de paille, lisier et pneus usagés pour protester contre le protocole de lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).
« Ce n'est pas acceptable de tuer des bêtes saines. On peut comprendre qu'on peut tuer des bêtes malades, contaminées, mais les bêtes saines non », a dit à l'AFP Bruno Roustan, éleveur de bovins à Saint-Affrique (Aveyron).
🔴 #DNC : trop, c’est trop.
— Coordination Rurale (@coordinationrur) December 13, 2025
La DNC révèle une colère agricole profonde, nourrie par des années de décisions hors-sol, de normes déraisonnables et de mépris du terrain. Aujourd’hui, le monde agricole dit stop.
🔥 La mobilisation continue partout en France.#CR62, #CR48, #CR81,… pic.twitter.com/ROLWEzNhzi
Face aux actions des éleveurs en colère, le ministre a demandé samedi aux préfets et responsables de la police et de la gendarmerie de faire preuve de « souplesse » et de « tact » et d'intervenir en cas de « violences », de même source.
En Occitanie, la maladie touche désormais quatre départements: Pyrénées-Orientales, Ariège, Hautes-Pyrénées et Haute-Garonne, où un nouveau foyer a été détecté vendredi.
Les vétérinaires chahutés
Interrogé par l'AFP, le président du Conseil national de l'Ordre des vétérinaires Jacques Guérin a dénoncé des « pressions inacceptables » sur les professionnels chargés par l'Etat d'euthanasier les troupeaux affectés.
« Ce modèle sanitaire, qui a fait ses preuves depuis plus de 70 ans, a permis de traiter les grandes maladies des cheptels (...). Il y a parfois des choix dramatiques à faire pour certains élevages: mais c'est à ce prix-là qu'on protège les 16 millions de bovins du pays », a-t-il estimé.
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